Stenay, la Cité des Rois Mérovingiens et le Mystère du Triangle Mythique
Nichée au nord du département de la Meuse, Stenay est aujourd’hui une paisible cité de près de 4 000 habitants. Pourtant, derrière ses ruelles tranquilles et ses vestiges anciens, se cache une histoire d’une densité insoupçonnée. Ancienne capitale des rois d’Austrasie, elle fut, des siècles durant, un enjeu stratégique et symbolique au cœur des grandes guerres de l’Europe médiévale.
Durant la Première Guerre mondiale, Stenay connut un autre destin : elle devint le quartier général du Kronprinz, héritier de l’Empire allemand, qui y dirigea une partie des opérations sur le front occidental.
À environ 280 kilomètres de Paris, la ville semble aujourd’hui bien loin du tumulte des empires et des rois. Pourtant, sous ses pavés, plane encore l’ombre d’un passé sacré — celui des Mérovingiens, ces souverains auréolés de mystère.

Le Triangle Mythique
Peut-il exister, en France, un triangle mythique, reliant des lieux distants, mais porteurs d’un même secret enfoui au cœur de l’histoire européenne ?
C’est cette idée fascinante qui prit forme dans les années 1960 et 1970, sous la plume d’un auteur visionnaire : Gérard de Sède. À travers trois ouvrages devenus mythiques — Les Templiers sont parmi nous (1962), Le Trésor maudit de Rennes-le-Château (1967) et La Race fabuleuse – Extra-terrestres et mythologie mérovingienne (1973) — il dessina une cartographie symbolique de la France mystérieuse.

Ces trois lieux, Gisors, Rennes-le-Château et Stenay, formeraient les points d’un triangle mythique, une géographie sacrée dissimulant, peut-être, les fragments d’une même vérité : celle d’une histoire secrète de l’Europe, où se mêlent rois oubliés, lignées cachées, ordres initiatiques et héritages spirituels perdus.
Stenay, capitale mérovingienne
Sous les règnes mérovingiens, Stenay fut l’une des résidences favorites des rois d’Austrasie. Elle entra dans la légende à travers un drame : l’assassinat du roi Dagobert II, dernier souverain mérovingien indépendant.

Le 23 décembre 679, au cœur de la forêt de la Woëvre, Dagobert est surpris lors d’une chasse. Selon la Vita Dagoberti, rédigée à la fin du IXᵉ siècle, il tombe dans une embuscade tendue par Ébroïn, maire du palais, et exécutée par Grimoald, son filleul.

Le roi est abattu sans pitié. Sa mort scelle la fin d’une dynastie qui portait encore en elle l’aura d’un pouvoir sacré, hérité des traditions franques et des mystères du sang royal.
Mais c’est précisément de cette tragédie que naquit la légende.
La survie du sang royal : Sigebert IV
Les chroniques officielles affirment que Sigebert IV, fils de Dagobert II et de la reine Béchilde, fut assassiné peu après son père. Pourtant, une tout autre version — transmise par la tradition orale et les récits ésotériques — prétend que l’enfant survécut.
Protégé par sa mère, il aurait été confié à des hommes sûrs, moines ou fidèles serviteurs, chargés de le mettre à l’abri des complots de la cour. Ainsi commença un long voyage à travers la Gaule, du nord au sud, jusqu’à un lieu retiré et secret : un oppidum des Pyrénées situé près du fleuve Artax, que l’on nommait Rhédae — nom qui, au fil des siècles, deviendra célèbre sous une autre appellation : Rennes-le-Château.

De Stenay à Rennes, le fil invisible de l’histoire tisse une continuité troublante.
Si Sigebert IV a bien survécu, alors la lignée de Dagobert II ne s’est jamais éteinte. Et avec elle, le sang sacré des Mérovingiens aurait continué de couler, dissimulé, à travers les âges.
La légende du Rejeton Ardent
Certains auteurs — notamment ceux de L’Énigme Sacrée (1982) — évoquent la légende du Rejeton Ardent, ou Plant-Ard en vieux français. Ce terme, repris plus tard par Pierre Plantard, aurait servi à justifier l’existence d’une descendance mérovingienne secrète, perpétuée dans l’ombre jusqu’à l’époque moderne.
Selon cette interprétation, Sigebert IV serait le maillon caché d’une dynastie occulte, dépositaire d’un savoir et d’une mission spirituelle liés à la France sacrée et à l’Europe mystique.
Derrière le mythe de Stenay, se profile ainsi toute une symbolique : celle de la survivance du royaume spirituel des Francs, que certains associent au Prieuré de Sion, aux Templiers, ou encore à la Rose-Croix.
Une légende vivante
Stenay, Gisors, Rennes-le-Château… Trois noms, trois pôles, trois portes ouvertes sur un même mystère : celui de la France ésotérique, là où se mêlent l’histoire et le mythe.
Pour les uns, il ne s’agit que de coïncidences géographiques et de récits romanesques. Pour d’autres, ces lieux forment les points d’un réseau initiatique, gardien d’un secret d’État ou d’une vérité spirituelle oubliée.
À Stenay, l’ombre de Dagobert II plane encore, tandis que celle de son fils Sigebert IV continue d’alimenter la rumeur d’une lignée cachée, peut-être vivante encore.
Et si, derrière ces récits en apparence légendaires, se dissimulait la mémoire d’une royauté spirituelle, celle des rois thaumaturges, héritiers d’un savoir antique et d’une mission perdue ?
Alors, Stenay ne serait pas seulement une ville d’histoire, mais un sanctuaire de mémoire, un des points cardinaux de la grande géométrie sacrée de l’Europe.